Le régime fiscal des revenus des droits d’auteur a été modifié par la loi-programme du 26 décembre 2022
Que prévoit la nouvelle loi ?
L’objectif de la modification légale est de réduire le champ d’application du régime fiscal instauré en 2008. Le régime de taxation comme revenu mobilier au taux de 15% (après déduction de frais forfaitaires) a été maintenu, mais des modifications importantes y sont apportées :
- Condition d’éligibilité renforcée entraînant l’exclusion de certains auteurs
- Limitation du montant bénéficiant du régime lorsque la cession de droits d’auteur est couplée à des prestations
- Exclusion pour les auteurs qui perçoivent des revenus de droits d’auteur réguliers supérieurs à 70.220 €
Ces modifications sont entrées en vigueur au 1er janvier 2023. Un régime transitoire d’une durée d’un an est cependant prévu pour les auteurs qui ont bénéficié du régime de 2008 au cours de l’année 2022 (voir ci-dessous).
Condition d’éligibilité renforcée entraînant l’exclusion de certains auteurs
Le nouveau régime s’appliquera uniquement aux revenus obtenus de la cession (ou de l’octroi d’une licence) de droits d’auteur en vue de l’exploitation ou de l’utilisation effective de ces droits par le cessionnaire, le détenteur de la licence ou un tiers.
L’auteur devra soit disposer d’une attestation du travail des arts, soit justifier que le débiteur des droits d’auteur (employeur, société de management ou client) acquiert ceux-ci en vue d’une « communication au public » ou d’une « reproduction ».
Les notions de « communication au public » et de « reproduction » ne sont pas définies dans la loi. L’exposé des motifs fait référence à la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes. Selon cette jurisprudence, la notion de « public » vise un nombre indéterminé de destinataires potentiels et implique, par ailleurs, un nombre de personnes assez important. À propos du caractère « indéterminé » du public, il doit s’agir de rendre perceptible une œuvre de toute manière appropriée à des « personnes en général », par opposition à des personnes déterminées appartenant à un groupe privé.
L’intention semble être de refuser l’application du régime fiscal aux créations destinées à un usage interne ou limité par l’employeur, la société de management ou le client qui acquièrent les droits de l’auteur. La portée précise de cette nouvelle condition pourrait être difficile à apprécier dans de nombreuses situations et elle donnera très certainement lieu à d’intenses discussions avec le Service des Décisions Anticipées (ruling) et avec les contrôleurs de l’administration fiscale.
Application du nouveau régime à l’IT
Le maintien du régime fiscal des revenus de droits d’auteur aux créations informatiques a fait l’objet de discussions houleuses pendant l’adoption de la loi. Le texte de la loi est très imprécis sur cette question. Des arguments juridiques existent tant pour défendre l’application du nouveau régime aux créations informatiques que pour défendre leur exclusion.
Le Service des Décisions Anticipées (ruling) a très récemment pris la position que les créations informatiques ne sont plus éligibles au régime fiscal favorable. L’application du régime par les acteurs du secteur IT débouchera donc immanquablement sur une contestation en cas de contrôle.
Limitation lorsque la cession de droits d’auteur est couplée à des prestations
Lorsque la cession de droits d’auteur est couplée à une prestation de services (par exemple un employé qui cède ses droits d’auteur à son employeur ou un dirigeant d’entreprise qui cède ses droits d’auteur à sa société), les droits d’auteur imposables comme revenus mobiliers seront plafonnés à un pourcentage du total des rémunérations perçues. Les pourcentages seront les suivants :
- Revenus 2023 : 50%
- Revenus 2024 : 40%
- Revenus 2025 et suivants : 30%
Cette nouvelle limitation s’ajoute au plafond absolu de 70.220 € (montant indexé pour les revenus 2022). Dans la pratique, elle ne devrait pas impacter les travailleurs salariés et elle ne devrait pas impacter ou de manière très limitée les dirigeants d’entreprises dans la majorité des secteurs d’activité.
Exclusion pour les auteurs qui perçoivent des revenus de droits d’auteur réguliers supérieurs à 70.220 €
La loi prévoit que le régime de taxation à titre de revenus mobiliers ne sera pas d’application si la moyenne des revenus de droits d’auteur perçus au cours des 4 périodes imposables précédentes dépasse le plafond absolu de 70.220 € (montant indexé pour les revenus 2022). Lorsque cette nouvelle limite sera dépassée, le régime fiscal favorable ne pourra plus être appliqué du tout pour les revenus de la 5ième année.
Selon l’exposé des motifs, cette nouvelle limitation se justifie par le fait de réserver le régime fiscal favorable aux revenus de droits d’auteur « perçus de manière irrégulière et aléatoire ».
Régime transitoire
La loi contient un régime transitoire pour les contribuables qui ont perçu en 2022 des revenus de droits d’auteur éligibles au régime de 2008, mais exclus du nouveau régime en 2023.
Ce régime transitoire permet d’appliquer le régime fiscal favorable aux revenus 2023 avec les restrictions du nouveau régime et avec des restrictions spécifiques.
Ces restrictions spécifiques sont les suivantes :
- Le plafond absolu des revenus de droits d’auteur est réduit de moitié, soit 35.110 € au lieu de 70.220 € ; et
- Les tranches pour l’application du forfait de frais sont réduites de moitié
- Forfait de 50 % appliqué sur la première tranche de 9.360 € (au lieu de 18.720 €)
- Forfait de frais de 25% appliqué sur la tranche suivante de revenus de 9.360 € à 18.720 € (au lieu de 18.720 € à 35.110 €)
Ces limitations ne devraient avoir qu’un impact très limité dans la majorité des situations.